La Swiss Offshore Team, qui regroupe les talents suisses du large de demain, est allée au bout de The Ocean Race Europe. Une aventure qui pose de sérieux jalons pour la suite, selon son heureux skipper Alan Roura.
Clap de fin sur The Ocean Race pour le Team AMAALA qui se classe 7e après sept semaines de course, cinq étapes, et une infinité de grands moments vécus par la plus jeune équipe de la course. Il n’y a pas débat. Il y eut bien plus de hauts que de bas pour le Team AMAALA Racing. La Swiss Offshore Team n’a jamais rien lâché et a atteint tous les objectifs qu’elle s'était fixés. Partir du point A pour aller jusqu’au point B. Pas une, pas deux, mais cinq fois. Comme autant d’étapes entre Kiel, en Allemagne, et la Baie de Kotor au Monténégro. Faire défiler à bord les forces vives de demain. Apprendre. Comprendre. Et se défendre avec ses propres armes contre les meilleurs marins professionnels du monde. « Sept semaines d’une folle intensité pour moi, résume Alan Roura, capitaine au long cours qui n’a jamais quitté le navire, voyant passer à bord tout une nouvelle génération de marins suisses. J’ai énormément appris pendant cette course car c’était aussi une première pour moi que d’avoir ce rôle de skipper en équipage. J’ai aussi énormément appris en tant que marin, ne serait-ce qu’en multipliant les départs qui sont toujours des phases que l’on ne travaille pas forcément. Là, en sept semaines, j’ai pris autant de départ qu’en deux ans ! »
Avec un bateau dont chacun connaissait les forces et les faiblesses, l’essentiel était de mettre en route un processus en vue d’une participation aux prochaines épreuves de The Ocean Race. Que ce soit en Atlantique en 2026, et bien sûr autour du monde en 2027 avec The Ocean Race. Un objectif majeur, placé au cœur du projet lancé par Alan Roura, Simon Koster et Elodie Mettraux. C’est en 2024 que les trois navigateurs expérimentés ont planté la graine de cette équipe Suisse de course au large. C’est au printemps 2025, après un troisième Vendée Globe bouclé en bon marin, qu’Alan Roura et son équipe ont pu activer la mise en place concrète de ce projet grâce à l’engagement d’AMAALA. Dès son annonce, ce défi en équipage a suscité un élan d’enthousiasme qui n’a jamais faibli. Trois mois pour un pari fou Trois mois pour tout faire. Un pari un peu fou mais un pari à l’image du skipper genevois pour qui tout est toujours possible. Le « ça va le faire » est la marque de fabrique d’Alan Roura. Un mantra qu’il répète depuis ses débuts, à 20 ans, dans la course au large. Une passion, une confiance et une envie de large qu’il souhaite transmettre aux jeunes marins suisses qui manquent parfois d’opportunités pour goûter à l’eau salée. « C’est toute la philosophie qu’il y a dans ce projet avec AMAALA, dit-il. Permettre à tous ces jeunes navigateurs et navigatrices issus de parcours véliques très différents de découvrir le large et les grandes courses. »
Après un processus de sélection rigoureux et une phase d’entraînement express, la première victoire a été de se présenter sur la ligne de départ dans les temps. « Le timing était chaud mais avec l’engagement de tout le monde au sein de l’équipe, que ce soit les marins, les préparateurs techniques, la communication, nous avons réussi à être bien prêts pour le grand départ à Kiel qui restera dans les mémoires de tout le monde. La parade pour accéder aux bateaux, la foule, puis le départ au reaching. C’était fou ! »
Des moments forts qui feraient presque oublier qu’avec un bateau plus ancien et forcément moins rapide que tous les autres, il fallait avoir en tête d’autres objectifs que celui de la performance pure. De fil en aiguille, de changement d’équipage en changement d’équipage, le Team AMAALA a pourtant conquis les foules. « Sans doute parce que nous n’avons jamais rien lâché alors que certains de nos jeunes marins n’avaient encore jamais passé une nuit en mer en course sur un bateau comme le nôtre, dit Alan Roura. Mais aussi parce que malgré les difficultés nous avons su garder le sourire et le moral. »
Une joie de vivre et une soif d’apprendre qui ont été contagieuses. « Je suis arrivé sur la dernière étape et c’est vrai que l’ambiance au sein de l’équipe était parfaite, souligne Yann Burkhalter. Malgré des conditions de vie pas évidentes, dans un espace restreint, et malgré des conditions météorologiques qui ont été très compliquées, avec de très longues phases sans vent, nous avons tous très bien vécu ensemble. Nos cafés-terrasses, sur le pont du bateau, font partie de ces petits moments magiques que l’équipe et Alan ont su créer pour souder tout le monde. »
Dans une course en équipage, le facteur humain est sans doute l’élément le plus compliqué à gérer. Chez le Team AMAALA, il l’a été de main de maître de l’avis de tous les intéressés. « On ne s’est pas trompés lors des sélections, apprécie Alan Roura. Nous avons attaché énormément d’importance à cet aspect humain et mental car au-delà de cette course de l’Europe, c’est un tour du monde que nous avons dans le viseur. Ce n’est pas rien. Vivre ensemble plusieurs semaines dans des conditions souvent extrêmes n’a rien d'anodin. Cette première expérience a donc été très positive car il n’y a pas eu le moindre problème. Jamais un mot plus haut que l’autre. Chacun a pu amener ses idées, partager ses sentiments. »
Une belle union renforcée par des performances sportives qui ont dépassé le cadre du résultat brut. « Malgré les changements de personnes à bord, nous avons toujours trouvé le moyen de progresser lors de chaque étape, se réjouit Alan Roura. Avec l’équipe la plus jeune et inexpérimentée, avec un bateau moins rapide, nous n’avons jamais été ridicules et nous avons essayé de jouer des coups à fond. »
Un bateau poussé dans ses retranchements. Des marins qui gardent le sourire malgré tout. Le Team AMAALA aura marqué de très belle manière cette Ocean Race Europe. Et posé des jalons pour les saisons à venir. « Plusieurs navigateurs des autres équipes sont venus nous voir pour nous féliciter et nous souhaiter de pouvoir très bientôt bénéficier d’un bateau plus performant et d’une équipe qui aura encore gagné en maturité. Cette reconnaissance sincère est la plus belle et fait chaud au cœur. Elle nous donne surtout un coup de boost pour continuer ce que nous venons de commencer. »
Ces prochaines semaines, le bateau va rejoindre AMAALA au bord de la mer Rouge, tandis que des discussions avec les partenaires et nombre de prospects suisses ont été entamées, pour s’inscrire dans la continuité de cette première expérience en équipage. « L’idée, c’est de trouver un bateau plus récent et plus compétitif pour poursuivre notre projet en ayant les moyens d’aller jouer avec les meilleurs autour du monde en 2027, et ce dès la saison 2026, avec une transatlantique en équipage mixte qui nous fait très envie », conclut Alan Roura.
Image © Marc Lloyd / The Ocean Race Europe